Pour doper sa carrière, le cadre dirigeant doit se confronter à des zones géographiques différentes et des typologies de marché complémentaires, selon Christophe Tellier, cofondateur de Beyond Associés.
L'expatriation est-elle toujours un accélérateur de carrière pour les cadres dirigeants ?
Il est aujourd'hui moins question d'« expatriation » que de « carrière internationale » . Dans les années 2000, on a commencé à voir des cadres dirigeants passer de pays européen en pays européen sans bénéficier d'un programme d'expatriation au sens strict du terme, avant que cette dynamique ne s'élargisse à l'ensemble du monde. Le plus souvent, ils vont d'une région à une autre, d'une entreprise à une autre, sans rattachement à leur pays d'origine, libérés de cet élastique qui les ramenait régulièrement à leur base initiale.
Une expérience internationale est toujours un accélérateur de carrière, et je dirais même qu'à l'inverse, ne pas en avoir constitue un frein. Un cadre dirigeant qui n'aurait qu'une expérience monofocus sur un pays restreindrait fortement son horizon professionnel. S'ouvrir à d'autres clients, à d'autres coutumes, à d'autres cultures, y compris au sein d'entreprises différentes, est un élément fondamental qui permet d'élargir sa palette de compétences, à la fois en matière de savoir-être et de savoir-faire.
Existe-t-il des pays ou régions plus propices que d'autres à un développement professionnel rapide ?
L'Amérique du Nord et l'Asie restent les deux zones les plus profitables car elles permettent de développer des compétences différentes. Contrairement à l'Europe, où les cadres dirigeants doivent adopter une gestion tendue dans un contexte d'économie à faible croissance, ils s'y concentrent sur le développement et le déploiement de l'activité.
Toutefois, rester trop longtemps dans ces régions à très forte croissance peut conduire à cultiver des compétences très spécifiques qui rendent le retour en Europe difficile . Exercer dix ans en Asie, par exemple, peut aboutir à être considéré comme un « cadre dirigeant asiatique » et l'entreprise ne verrait alors pas l'intérêt de faire revenir un tel profil.
Quelle serait la carrière internationale idéale ?
L'idéal est d'avoir géré différentes typologies de marché pour acquérir des compétences complémentaires et devenir un cadre dirigeant multi-terrains. Cela permet de posséder les compétences nécessaires pour intervenir dans n'importe quelle région du monde, mais aussi pour devenir numéro un, car un tel profil saura gérer une palette de situations très variées, et aura renforcé sa crédibilité.
Sur les marchés à forte croissance, il vaut mieux rester cinq ans que trois ans en poste afin de prouver que l'on sait gérer la croissance, et pas simplement en générer. Dans les marchés plus matures, une expérience de deux ou trois ans suffit généralement. Elle donne le temps nécessaire pour définir une stratégie, en commencer l'exécution et poser des bases solides pour son successeur.
Dans tous les cas, une bonne expérience internationale repose sur la pénétration des réseaux locaux. Lorsqu' un cadre dirigeant basé en Chine est invité officiellement par les autorités chinoises ou lorsqu'un autre situé aux Etats-Unis est appelé au conseil d'administration d'un hôpital local ou d'une université, il se construit un réseau sur lequel il peut s'appuyer, à la fois en faveur de son entreprise, mais aussi pour sa propre carrière.
Christophe Tellier, Executive Talent Advisor, Beyond Associés